Choisir la proportionnelle pour les législatives ?

Choisir la proportionnelle pour les législatives ?

Christophe Boutin et Frédéric Rouvillois, tous deux universitaires et spécialistes de sciences politiques et de droit public, avaient déjà publié au début de l’année un passionnant petit ouvrage (signalé dans notre n° 1333) sur les parrainages d’élus pour la présidentielle.

Ils récidivent – avec toujours la même érudition et le même regard iconoclaste – sur le mode de scrutin.

Autant le dire tout de suite, ce petit livre m’a fait changer d’avis sur le sujet.

J’avais trois raisons principales de m’opposer à la proportionnelle et de lui préférer le scrutin majoritaire à un tour : l’instabilité gouvernementale, l’excessif poids des partis dans la vie politique, et la perte de contact entre les élus et les électeurs.

Je continue à préférer le scrutin majoritaire à un tour qui permettrait de structurer la vie politique sur l’opposition entre deux grandes visions du monde.

Mais Christophe Boutin et Frédéric Rouvillois montrent que les critiques que j’avais contre la proportionnelle ne résistent pas à l’examen approfondi.

Plus exactement, ces critiques peuvent tout aussi bien valoir contre l’actuel mode de scrutin.

Les partis jouent un rôle considérable dans le cadre du scrutin majoritaire à deux tours, puisque, sans le soutien d’un parti puissant, il est à peu près impossible d’être élu député.

Pire encore, les partis sont à ce point assurés de leur puissance qu’ils peuvent « parachuter » et faire élire des candidats inconnus des électeurs.

Ajoutons que le général De Gaulle, dont on connaît l’opposition au « régime des partis », était favorable à la proportionnelle – j’avoue que je l’ignorais, n’ayant retenu que les critiques des gaullistes les plus importants, à commencer par Michel Debré, contre la proportionnelle.

Surtout, il convient de noter que le scrutin majoritaire est impuissant à assurer une majorité à l’exécutif. Nous le savions depuis longtemps, avec les cohabitations. Nous le constatons encore en 2022, où les législatives ont privé le gouvernement de majorité absolue.

Mais l’argument le plus fort des auteurs en faveur de la proportionnelle consiste à rappeler que nous ne sommes plus sous la IVe République : tout le pouvoir n’est plus dépendant de l’Assemblée et le président, qui concentre bon nombre de ces pouvoirs, est directement élu (au scrutin majoritaire nécessairement) par le peuple.

Par conséquent, un pôle de stabilité puissant réside à l’Élysée. Il n’y aurait donc plus nécessairement d’inconvénient majeur à permettre la représentation des minorités politiques au sein de l’Assemblée. En sens inverse, les avantages bien connus de la proportionnelle (meilleure représentation des différentes tendances politiques et nécessité d’écouter davantage les minorités) pourraient apporter une respiration bienvenue dans notre vie politique.

Avec cette législature, issue du scrutin majoritaire, mais assez proche de ce qu’eût pu donner le scrutin proportionnel (au moins pour les principaux mouvements politiques), nous pourrons valider ou invalider un certain nombre des intuitions de cet ouvrage.

Mais il est certain que la proportionnelle eût évité l’union de la gauche sous l’autorité de Jean-Luc Mélenchon. Et cela seul eût été un excellent argument en faveur de ce mode de scrutin !

La proportionnelle: Ou comment rendre la parole au peuple

Partager cette publication

Comments (1)

  • quinctius cincinnatus Répondre

    Vous ne trouvez pas que c’ est assez le ” bordel ” comme ça ?
    Un scrutin à UN TOUR et basta !

    11 juillet 2022 à 21 h 33 min

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *